Le cheval, herbivore non-ruminant, possède un système digestif unique, adapté à la digestion de fourrages riches en fibres. Contrairement aux ruminants comme les vaches ou les moutons, il n'a pas de rumen pour la fermentation préliminaire. Cette particularité influence sa physiologie digestive et sa sensibilité à certains troubles. Comprendre son fonctionnement est crucial pour assurer sa santé et son bien-être.

Anatomie du système digestif équine

L'appareil digestif du cheval est un long tube qui s'étend de la bouche à l'anus, comprenant plusieurs compartiments spécialisés. Sa taille et sa complexité sont impressionnantes, et son organisation reflète son adaptation à une alimentation à base de végétaux fibreux. Analysons chaque partie de ce système fascinant.

Bouche et pharynx : la première étape de la digestion

La bouche du cheval est équipée d'une dentition spécifique à son régime alimentaire. Les chevaux adultes possèdent généralement entre 36 et 40 dents : incisives pour couper l’herbe, prémolaires et molaires pour la broyer. La mastication est essentielle pour réduire la taille des particules végétales et augmenter leur surface d'exposition aux enzymes digestives. La production quotidienne de salive, estimée entre 10 et 12 litres, lubrifie le bol alimentaire et amorce la digestion des glucides grâce à l'amylase salivaire. Une mastication efficace est garante d’une meilleure digestion et réduit les risques de coliques.

Œsophage : le transport du bol alimentaire

L'œsophage, un tube musculaire d'environ 1,5 mètres de long, transporte le bol alimentaire de la bouche vers l'estomac par des mouvements péristaltiques. Ce transport est généralement rapide et efficace, mais des problèmes peuvent survenir en cas d'ingestion de corps étrangers.

Estomac : digestion chimique initiale

L'estomac du cheval est relativement petit, représentant seulement 8% du volume total du tractus digestif, soit une capacité d'environ 15 à 20 litres. Ce volume restreint explique sa sensibilité aux surcharges alimentaires. L'estomac sécrète de l'acide chlorhydrique et des enzymes, principalement la pepsine, pour commencer la digestion des protéines. La faible capacité de l'estomac rend les chevaux particulièrement vulnérables aux ulcères gastriques, souvent liés au stress, à une alimentation inadaptée ou à un travail intense.

Intestin grêle : absorption des nutriments essentiels

L'intestin grêle, long d'environ 25 mètres, est composé du duodénum, du jéjunum et de l'iléon. Il constitue le principal site d'absorption des nutriments. Les enzymes pancréatiques (amylase, lipase, protéases) et intestinales, ainsi que la bile du foie, décomposent les glucides, lipides et protéines en éléments assimilables par l'organisme. Les nutriments sont alors absorbés et passent dans le sang. Le processus d'absorption est très efficace et permet au cheval d'extraire le maximum de valeur nutritionnelle de son alimentation.

  • Duodénum : Reçoit les sécrétions biliaires et pancréatiques essentielles à la digestion.
  • Jéjunum : Principal lieu d'absorption des nutriments.
  • Iléon : Absorption de la vitamine B12 et des sels biliaires.

Gros intestin : fermentation microbienne et absorption d'eau

Le gros intestin, occupant environ 60% du volume total du tractus digestif, est composé du cæcum, du côlon (avec ses différentes parties : côlon ventral droit, côlon ventral gauche, côlon dorsal gauche, côlon dorsal droit, et côlon transverse) et du rectum. C'est le siège principal de la fermentation microbienne des fibres. Le cæcum, une vaste poche de fermentation (25 à 40 litres), abrite une flore microbienne complexe qui dégrade la cellulose et autres fibres, produisant des acides gras volatils (AGV) – acétate, propionate et butyrate – qui constituent une source d'énergie majeure pour le cheval. Le côlon poursuit la fermentation, l'absorption de l'eau et des électrolytes. Le rectum, enfin, stocke les fèces avant leur expulsion.

Annexes : foie et pancréas

Le foie joue un rôle crucial en produisant la bile, indispensable à la digestion des graisses. Le pancréas, quant à lui, sécrète des enzymes digestives (amylase pancréatique, lipase pancréatique, protéases) et de l'insuline, qui régule le taux de glucose dans le sang. Ces organes annexes sont vitaux pour le bon fonctionnement du système digestif équine.

Fonctionnement du système digestif équine : la digestion en étapes

La digestion chez le cheval est un processus dynamique, combinant des actions mécaniques, chimiques et microbiologiques. Une bonne compréhension de ces étapes est fondamentale pour optimiser l'alimentation et prévenir les problèmes digestifs.

Digestion mécanique : la préparation des aliments

La digestion mécanique débute par la mastication dans la bouche. Une mastication approfondie est primordiale pour augmenter la surface de contact des aliments avec les enzymes et optimiser la digestion. Les mouvements péristaltiques, des contractions musculaires du tube digestif, propulsent ensuite le bol alimentaire le long du tractus.

Digestion chimique : dégradation des nutriments

La digestion chimique utilise des enzymes pour dégrader les nutriments. L'amylase salivaire commence la dégradation des glucides dans la bouche. Dans l'estomac, la pepsine attaque les protéines. Dans l'intestin grêle, les enzymes pancréatiques et intestinales poursuivent la dégradation des glucides, lipides et protéines en molécules plus simples. La bile, émulsionnant les graisses, facilite leur digestion et leur absorption.

Fermentation microbienne : L'Énergie des fibres

La fermentation microbienne dans le cæcum et le côlon est cruciale pour la digestion des fibres. Des milliards de bactéries, protozoaires et champignons dégradent la cellulose et les hémicelluloses, produisant des acides gras volatils (AGV) - acétate, propionate et butyrate - source majeure d'énergie pour le cheval. La fermentation synthétise également certaines vitamines B et la vitamine K.

Absorption des nutriments : passage dans le sang

L'absorption des nutriments se concentre principalement dans l'intestin grêle, où les molécules digérées passent dans le sang par diffusion ou transport actif. Le gros intestin absorbe aussi une partie de l'eau et des électrolytes. Une absorption efficace des nutriments est essentielle pour assurer les besoins énergétiques et nutritionnels du cheval.

Élimination des déchets : L'Expulsion des fèces

Les résidus non digérés, mélangés à des cellules de la paroi intestinale et des micro-organismes, forment les fèces. Elles sont stockées dans le rectum avant leur expulsion. Un cheval adulte élimine en moyenne 8 à 12 fois par jour des bouses dont l'aspect (consistance, couleur, odeur) renseigne sur son état de santé digestif.

Particularités du système digestif équine et implications pratiques

La compréhension du système digestif équine est essentielle pour prévenir les problèmes et assurer le bien-être du cheval. Sa sensibilité à certains troubles nécessite une attention particulière à son alimentation et à son environnement.

Sensibilité aux troubles digestifs : coliques, diarrhées, constipations

Les chevaux sont sensibles aux troubles digestifs. Les coliques, douleurs abdominales d'origines diverses (obstruction, torsion, inflammation...), nécessitent une intervention vétérinaire urgente. Les diarrhées et les constipations, reflets d'un déséquilibre de la flore intestinale ou du transit, doivent être surveillées attentivement. Une alimentation équilibrée et un accès permanent à de l’eau propre sont essentiels pour une bonne santé digestive. Un changement d’alimentation doit être progressif pour éviter un stress digestif.

  • Coliques : Douleurs abdominales, nécessitant une intervention vétérinaire rapide. Plusieurs types de coliques existent, chacune ayant des causes et des symptômes spécifiques.
  • Diarrhées : Perte de consistance des selles, pouvant indiquer une infection, une inflammation ou un déséquilibre de la flore intestinale.
  • Constipations : Difficulté à déféquer, souvent liée à une déshydratation ou à une alimentation pauvre en fibres.

Adaptation de l'alimentation : une alimentation riche en fibres

L'alimentation doit être adaptée à l'âge, à l'activité, à la race et à l'état de santé du cheval. Une alimentation riche en fibres de qualité (foin, paille) est essentielle pour stimuler la motricité digestive et la fermentation microbienne. Les céréales et autres concentrés doivent être administrés avec modération pour éviter les troubles digestifs. L'introduction progressive de nouveaux aliments minimise le risque de réactions adverses. Un régime équilibré est la clé d'une bonne digestion.

Impact de l'alimentation : qualité du fourrage et gestion des rations

La qualité du fourrage est un facteur déterminant. Un foin de bonne qualité, riche en fibres et pauvre en poussières, est essentiel. La gestion des rations doit être précise, en fonction des besoins énergétiques du cheval. Des rations mal équilibrées, avec des excès d'amidon ou de sucre, peuvent déséquilibrer la flore intestinale et engendrer des coliques ou d'autres troubles digestifs. L’eau doit toujours être accessible en quantité suffisante.

Rôle de l'eau : essentiel pour la digestion et l'absorption

Un accès constant à une eau propre et fraîche est primordial. L'eau participe à la digestion, à l'absorption des nutriments et au bon fonctionnement du transit intestinal. La déshydratation aggrave les troubles digestifs et peut être un facteur déclenchant.

Perspectives de recherche : microbiote intestinal et nutrition préventive

La recherche sur le microbiote intestinal du cheval avance rapidement. Une meilleure compréhension du rôle des différentes bactéries dans la digestion et la santé ouvre de nouvelles perspectives pour la prévention et le traitement des troubles digestifs. Des stratégies nutritionnelles personnalisées, ciblant la modulation du microbiote, pourraient révolutionner la gestion de la santé digestive équine dans le futur. Le développement de probiotiques et de prébiotiques spécifiques pourrait également contribuer à améliorer la santé digestive des chevaux.